Chaque jour ouvrir la porte
Où tu n’es qu’un avec toi-même
Sans bavardage inutile
Sans projet
Seulement posé dans l’axe
Qui te soulève
Et te repose
Non pas perdu dans le monde
Mais orienté
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Blog Jean Lavoué "Saviez-vous que les arbres parlent? Ils le font pourtant! Ils se parlent entre eux et ils vous parleront si vous écoutez." Tatanga Mani, Pieds nus sur la terre sacrée... "Il faut reboiser l'âme humaine." Julos Beaucarne
Chaque jour ouvrir la porte
Où tu n’es qu’un avec toi-même
Sans bavardage inutile
Sans projet
Seulement posé dans l’axe
Qui te soulève
Et te repose
Non pas perdu dans le monde
Mais orienté
C’est un ciel que tu ne peux toucher
Un vide que tu ne peux décrire
Un silence que tu ne peux nommer
Un amour que tu ne peux étreindre
Et ce n’est rien de tout cela
Seulement le rappel d’un frôlement d’aile
Dans la nuit de l’oubli
La parole
Qui a su la sculpter comme Lui
Jusqu’à la rendre vivante
Familière
Invitation
A faire de même
A consoler au fond de soi
L’impatience du germe
Nul déclin
Dans les couleurs du chant
Le pourpre répond à la nuit
Comme un soleil troublé
Tout surgissement
Est œuvre de racines
De forces oubliées
Souvent les mots
Manquent à l’appel
Tu refais tes gammes
Tu comptes et recomptes
L’arpège de ton pas
Tu aimerais sortir du rang
Qu’un cri soudain
Ou qu’un silence
Ordonne
Portant le sacrement du monde
Tel un ciel éphémère
Que tu saurais nommer
Même le poème devrait se voiler
Devenir nuage de silence
Laisser les lettres et les mots
Se dissoudre
Pour tenter d’approcher Cela
Qui toujours le fuit
Et l’appelle
Toujours partielle
La communion que tu éprouves
Et cependant vibrante
Dans l’axe où le temps s’abolit
Tout ce que j’écris
Des chutes de poèmes
Des morceaux d’écorce
Des aiguilles de pin
Des feuilles détachées de l’arbre
Et parfois un oiseau
Qui dessine de grand cercles
En sifflotant le nom de la joie
Le jour
Où je me tiendrai debout
Sans autres attaches
Que ces racines qui me lient à la terre
Que ces branches qui me tirent
Vers le soleil
Le jour où je serai délivré
De la surface des choses
Et de moi-même
Peut-être que dans ce jardin
Outre les oliviers
Il y avait des nids
Peut-être que sous l’éclat des voix
Des insectes chuchotaient
Que sous le feu des torches
Les étoiles pâlissaient
Peut-être que tout au bout du monde
Un soleil rougeoyant
De trois gouttes de sang
Baptisait le matin
Sa demeure
Elle était dans les nids
Dans les prés
Dans les yeux des jonquilles
Dans le vent effronté
Et moi aussi j’étais sa demeure
Chaque fois que son silence me couvrait
D’une ignorance étoilée
Seuil
C’est un mot que je dessine
A la pointe du doigt
A peine
Je ne sais pas si c’est dehors
Ou bien dedans
Mais la porte souveraine
Où la solitude s’embrase
Oui je la connais
Les lourds vantaux
Volés en éclats
Un beau matin de printemps
Ah ! si je pouvais ralentir
Comme l’arbre
Avoir tout le ciel pour moi
Tout l’espace
Toute la terre
Et ne vouloir rien d’autre pourtant
Que cette journée
Que ce souffle léger
Que cette compagnie de l’herbe
L’arbre n’est ni un gouvernail
Ni un poteau indicateur
Il occupe simplement le seuil
Du pays où nul ne peut entrer
Sans s’être d’abord déchaussé
Trouverai-je un jour à parler
A hauteur d’arbre
C'est-à-dire sans forcer la voix
Sans autre voie peut-être
Que la croix des saisons
Et le ciel grand ouvert
Je donnerai à ton mystère
Soleil nocturne
Tous les attributs de la terre
Où j’ai profondément planté
Mes racines
J’avance à tâtons dans la nuit des signes
Jusqu’à ce que l’un d’entre eux se détache
Et qu’il ne reste de lui
Que le tremblement de la feuille
L’imperceptible entaille
Où se lit l’entame de ton nom
Gravée sur l’écorce
Blessure incandescente
Autour de laquelle
Toute la croissance de l’arbre
S’ordonne
.
Ce qui nous relie
N’a pas besoin de mots
Ni de dates
Ni de rites
Et pourtant il arrive qu’un anniversaire
Dont toutes les flammes ont dévoré le temps
Longtemps après qu’elles se soient éteintes
Soudainement illumine
C’est autour d’un mouvement
Que la vie s’ordonne
Non d’un point fixe
Que tu crois parfois trouver
Dans l’armature de tes pensées
Vois l’arbre dans son ardente station
Dressé à la pointe ultime
De cette pulsation
L’ancrage en lui que je célèbre
L’affirmation souveraine
Que le royaume est là
Tous les éclats du soleil
Toutes les morsures du gel
Toutes les colères du vent
Et toutes ses accalmies
Tu en fait cette vie qui respire
Et qui dure
Secouer la cage des mots
Percer le mensonge jusqu’au ciel
Consentir au sacre
Comment cela se pourrait-il
Sans cette plongée sans fond des racines
Dans la terre du silence
Grandir par poussées successives
Dans la hâte des saisons
Sans renoncer jamais au vent
Ni dans l’oubli de ce qui croît
Et cependant ouvert
Comme une oreille dans la nuit
A jamais tendue vers l’appel
La joie ne suppose pas
L’abandon des questions
Mais qu’elles deviennent dansantes
Autour d’un centre qui respire
L’arbre nous l’évidons
Pour en faire des flûtes
Ne sachant écouter
La musique silencieuse
De part en part qui le traverse