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Blog Jean Lavoué "Saviez-vous que les arbres parlent? Ils le font pourtant! Ils se parlent entre eux et ils vous parleront si vous écoutez." Tatanga Mani, Pieds nus sur la terre sacrée... "Il faut reboiser l'âme humaine." Julos Beaucarne
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vendredi 31 mars 2023
mercredi 29 mars 2023
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lundi 27 mars 2023
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Acte de résistance s’écriera mon poème
Je n’ai que ces bourgeons
Quelques jacinthes des bois
Et là quelques brindilles
Un printemps qui se tient
Juste au bord de l’abîme
Et sur moi pour seule arme
Cette Haute tendresse
Qui m’avertit au moindre souffle
En m’adressant incognito
À l’horizon du cœur
De simples signes de lumière
Elle est la flamme elle est l’intime
Par des sentiers cachés
Elle m'oriente me conduit
À l’ombre d’un combat inégal
Me soigne et me guérit
Je suis parent des silencieux
Qui pour elle élèvent un hymne
Et sans doute un peu voisin du frère nu
Qui en son nom prophétise
L’ardente joie
Et l’assurance qu’en chemin
Un chant souverain nous délivre.
Jean Lavoué, 27 mars 2015/2023
www.enfancedesarbres.com
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vendredi 24 mars 2023
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Merci, cher Emmanuel Godo, pour cette nouvelle chronique sensible consacrée à la poésie ! Merci d’y citer mon ami Philippe Forcioli qui vient de nous quitter en nous confiant à demi-mot cet « irracontable » qui nous bouleverse… « La poésie, comme le cuivre de la vie, est toujours « en avant »… Le poème ne s’écrit jamais à partir d’une connaissance mais pour tenter une réponse… »
L’irracontable
La chronique d’Emmanuel Godo, Poète et essayiste
Emmanuel Godo, La Croix, le 22/03/2023
Le temps humain, de grandes voix de la pensée nous disent que c’est celui qui passe par la médiation du récit. Conteurs, nous le sommes tous, de nos vies, de la marche du monde. On peut même soutenir qu’un recueil de poèmes est une sorte d’histoire que l’on narre autrement – Ovide moderne, Du Bellay raconte, dans Les Regrets, son voyage initiatique entre France et Italie. Et il n’est pas impossible qu’au fond de chaque poème, on trouve le fantôme d’une fable.
Mais il m’a toujours semblé que le temps le plus spontanément humain était celui qui ne se raconte pas. Celui qui vient empêcher la mise en récit. L’instant qui nous laisse bouche bée. Celui qui nous sidère. Qui nous fait mesurer à quel point les mots trahissent ce que nous éprouvons. Ce tournis de sensations contraires que la raison a du mal à démêler, qu’elle voudrait bien mettre en ordre, faire entrer dans la logique d’un récit. Tous ces moments où si quelqu’un nous y surprenait, en nous demandant : « Qu’est-ce qui t’arrive ? », nous répondrions : « Rien, je rêvasse ».
La poésie a à voir avec cette expérience de l’irracontable. De l’impossibilité de faire tenir ce que nous ressentons dans la forme narrative. Le poète est cet être qui s’attarde, qui reste attentif à ce qui met le langage en défaut. Tout poème est un essai de faire entrer dans l’ordre des mots ces impressions dont on n’a jamais su quoi faire. Ces choses entrevues, quasi imperceptibles, inavouables en un sens, que l’entendement, dans son versant utilitaire, délaisse ou piétine parce qu’elles ne servent à rien, croit-il : « Des petits temps dans le grand Temps/Qui flottent en hésitant sur le mouvement à suivre » (Philippe Forcioli, Les Impromptus de La Sauvegarde, L’Enfance des arbres, 2023).
Et pourtant ! L’essentiel est un presque rien, une chose légère entre les choses légères. Le plus poète des philosophes, Vladimir Jankélévitch, n’a cessé de nous le rappeler. Là où le passant pressé ne verra rien qui puisse compter, le poète jure fidélité au coup d’ongle fugace de la perception. Et nous le redonnera, à la lumière des mots, par son travail de patience, comme une vérité sans laquelle nous serions en péril de ne plus être les témoins de la splendeur du monde : « En se mirant/dans une flaque/d’eau/le rocher/prend l’allure/d’une tour » (Enza Palamara, La Gloire d’être, La Centaurée, 2012).
La poésie resitue la vie comme aventure, improvisation merveilleuse, impréparation continuelle. Elle ne sera jamais un métier et les vrais poètes le savent bien : il leur est impossible de se prévaloir d’un quelconque savoir-faire, au risque de voir la grâce se détourner d’eux. Le poète est cet artisan qui réinvente constamment son geste, la matière qu’il façonne, l’objet qui va sortir de son labeur. C’est parce qu’on est toujours, comme le souffle Yves Leclair, « par erreur poète », que l’on peut épier l’aube qui se lève sur « la lumière bleue/des montagnes », entrevoir en elle le « miracle d’être » et s’arrêter avant d’aller trop loin dans l’imprudence du dire : « S’effacer/chiffon, sagesse » (Miniatures, L’Étoile des limites, 2023).
L’archange Rimbaud est là pour redire au poète qu’il ne peut pas s’asseoir dans la certitude. Que la poésie, comme le cuivre de la vie, est toujours « en avant ». Et qu’un poème ne s’écrit jamais à partir d’une connaissance mais pour tenter une réponse, comme un feu de paille, à la question : « Mais qu’est-ce que je cherche au juste ? » Richard Rognet nous fait entrer dans l’atelier du poète – c’est une amitié avec le feu, un refus du faux sérieux, un dialogue âpre comme une lutte avec l’ange aux semelles de vent : « tes courses superbes/sur d’obscurs chemins/susurraient aux herbes/des chants de gamins » (Dans un nid de flammes, L’Herbe qui tremble, 2023).
Dans sa quête, si précaire, le poète dispose d’un seul critérium, pour savoir si ce qu’il écrit est poésie : la vérité entraperçue, dévoilée une seconde dans ces offrandes du réel, ces sensations aussi imprévisibles que profondes et durables. Ce que j’écris tient-il devant le tombeau des amants ? Devant les mains usées de l’homme qu’on a privé de sa dignité ? Devant les larmes de la jeune fille qui aime tellement la vie qu’elle croit aimer la mort ?
Quand le poème ne résiste pas devant la brûlure du vivre, il nous tombe des mains. C’est que ce n’est pas un poème, mais un mirage fabriqué trop vite par quelqu’un qui n’a pas assez écouté le temps. Rien de tel avec Jean-Michel Maulpoix : il regarde implacablement en lui la « saison froide » de la vieillesse recouvrir son corps de la « cendre du désir ». La question que le destin lui pose, il nous la redonne en partage comme un chemin fragile : « Entends-tu cet oiseau qui appelle dans l’hiver ? » (Le Jardin sous la neige, Mercure de France, 2023).
Photo Serge Picard pour La Croix
jeudi 23 mars 2023
mercredi 22 mars 2023
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mardi 21 mars 2023
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lundi 20 mars 2023
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samedi 18 mars 2023
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vendredi 17 mars 2023
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jeudi 16 mars 2023
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mercredi 15 mars 2023
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Chaque jour accéder
Au silence des forêts
Même en pleine ville
Entendre au-dedans de soi
L’oiseau de l’éclaircie
Battre soudain des ailes
Le suivre
Jusqu’à la cime des grands pins
Franchir avec lui lacs et collines
Emprunter des chemins de feuilles
Que la pluie des derniers jours a rendus
Lourds et humides
Sentir le souffle des prairies
Nous rejoindre aux lisières
Suivre la trajectoire de la sève
Dans la nuit de l’arbre
Libérer notre cœur
De tant d’attaches inutiles
Et l’ouvrir dans toutes les directions
De la terre et du ciel
Jean Lavoué, le 14 mars 2023
Photo JL 14/03/23, bois de Saint-Caradec
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mardi 14 mars 2023
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Olivier Risser, auteur notamment d’ouvrages consacrés à Etty Hillesum publiés à L’enfance des arbres, a lu le livre de Philippe Forcioli, Les Impromptus de La Sauvegarde. Merci Olivier d’avoir su ainsi saisir l’élan de l’ami Philippe dans son dernier parcours en terre de poésie !
JL
"S’il y a peut-être çà et là quelques basses notes, l’essentiel de ce livre, Les Impromptus de la Sauvegarde, est porté par le souffle très large de la vie. Traversé par une sorte d’allégresse, comme ces cantates de Bach que l’auteur nous invite à écouter, le recueil n’est pas exempt de soubresauts dignes de Pierre Boulez. Frères des morceaux de Schubert, ces « Impromptus » ont peut-être davantage encore de parenté avec le jazz : « il nous faut du grain à moudre / du grain à moudre, du grain à moudre / Il nous faut du grain à moudre / Du grain à moudre il nous faut ».
En somme, ce livre écrit sur « un lit voiture » invite au chant tout autant qu’au voyage. A un chant, parsemé de jeux de mots, de jonglages des sonorités, un chant qui n’est jamais (seulement) triste et qui allume souvent des lanternes au cœur à force d’humour. Un chant qui aide au voyage dans le temps. Ainsi de « mon insomnie ni ni [qui] jamais ne se finit ni ni ». Et pourtant, de la peine, très certainement, il y en eut, de ces épreuves au bord de l’abîme, de ces sorties de route quand le poète « à plat » ne pouvait plus tenir le volant. Comme il est difficile aussi de refermer l’ouvrage sans être saisi d’émotion au moment de lire, justement « Fin N,i ni, Fini ». On comprend que le poète accepte un peu plus facilement que l’homme cette fin mais il y a là, dans cette sortie, plus qu’une politesse, un message d’espérance et d’amitié. Il y a là aussi, disons-le, du Cyrano qui emporte avec lui… « son panache » !
Le trésor essentiel de ce petit ouvrage écrit au fil des soins de dernière instance, c’est sans doute le lien qu’il tisse entre les humains, une sorte de « communion des saints », où les infirmières côtoient François d’Assise, François le pape, Pelé le footballeur : « les infirmières étaient avec le Père bien Adam et Eve ».
Le trésor essentiel de ce petit ouvrage tient – et quelle leçon ! – dans la gratitude, long et profond regard tourné vers l’enfance « dans le rétroviseur », lettre d’amour à la mère (« Mon chaire traizor »), souvenir d’un match de foot avec le père (« pour cet énormissime événement, mon papa avait prévu d’acheter des places bien à l’avance »). Dans la force donc de dire « merci » à la vie : « cette chance offerte à mon étroite fenêtre d’hôpital de m’émerveiller de ce don gratuit du ciel » et le pléonasme d’un don gratuit est ici le bienvenu.
Le trésor de cet ouvrage tient en un questionnement adressé à tous : « auriez-vous une définition de la joie ? » et dans… la réponse qu’il propose.
La vie, j’imagine, quand elle finit et qu’on regarde en arrière, doit ressembler à une longue, très longue phrase, comme celle dans « Quarante ans déjà », conjuguée (ce n’est pas un détail) au futur antérieur, qui court sur deux pleines pages et dans laquelle j’ai trouvé une pépite de poésie, une pépite d’instant, une pépite tout simplement, je crois, comme on en trouve peu :
« J’aurai beaucoup communié pour de rire mais gravement dans ma voiture les dimanches matins en écoutant la messe sur France Culture ».
Le trésor de ce recueil tient dans ce titre « Ne pas mourir encore vivant ». Quel gâchis, en effet, que de mourir encore vivant ! Autant attendre, pour mourir d’être vraiment mort. Mais comment, Philippe, être sûr d’en trouver la force quand « la valse folle des pensées » comme vous dites, nous empêche de nous (re)poser ? Dans le récit, dites-vous ? Sans doute. Dans la danse des notes, entre les mesures de la partition, en inventant de petits mensonges qui sont comme des allégories ? Oui. En disant «merci », me dites-vous ? Merci.
Si un jour je suis au lit comme Philippe, je veux être en vie comme Forcioli."
Olivier Risser
https://www.editionslenfancedesarbres.com/philippe-forcioli--les-impromptus-de-la-sauvegarde.html
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