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jeudi 30 juin 2022

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Quand tu reviens de loin             
Telle une arche sauvée
Dans la sève des arbres,
Le ciel est toujours bleu,

Toute la terre tremble,
Tu n’as que le silence,
La symphonie des feuilles 
Pour adoucir ta voix.

Chaque caillou des routes
Patiente sous ton pas,
Chaque pomme de pin
Te montre le chemin.    

Tu remercies l’instant                
Qui te redonne vie,
Et contemples en marchant         
Les orgues du soleil.                              

Tant de frères t’entourent
Des sœurs de la lumière
Dont le nom est sculpté
Sur l’écorce du vent ;

Tu dresses pour eux tous
La table du Poème,
Tu n’as qu’à te pencher
Pour consacrer ces mots : 

Sous l’aile des colombes
Tu nommes l’olivier,
Tu rassembles le grain,
Tu creuses ton sillon.

Jean Lavoué, Photo J.L. Bois de St-Caradec, en ce soir du 28 juin 2018, jour de gratitude…











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mercredi 29 juin 2022

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Les mots montent aujourd’hui de la terre,
Ils suivent la voie du souffle
Qui mène jusqu’au cœur. 

Ils chantent l’immense et l’Ouvert
Dont nous sommes les passants 
Oublieux et secrets. 

C’est une symphonie de branches,
D’humus et d’oiseaux
Qui emplit la nef de cette cathédrale intérieure.

Tout y est mûrissement, 
Souple poussée du fruit 
Dans les frondaisons de l’âme. 

Tu te laisses porter par ce presque rien,
Ce vide qui s’élève 
Aux pas de ta respiration,

Cette buée d’amour qui porte dans sa fragilité 
Le signe de la victoire 
Et de la vie généreuse.

Tu ne désires nul ailleurs, nul au-delà
Que cet ici enraciné
Dans l’inconnu de l’indicible présence.

L’absente la plus lointaine
Remue devant toi
Doucement les feuillages.

Le poème se vêt 
Des aromates du jour.

Dans l’abandon, tu prépares déjà 
Les vastes espaces du fécond silence
Où tu demeureras un jour.

Jean Lavoué, 27 mai 2022















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lundi 27 juin 2022

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Combien c'est reposant
De ne plus compter sur demain
Pour vivre aujourd'hui même
Tout ce qui est à vivre

Comme c'est libérant
De creuser chaque jour 
Le sillon de l’instant
Où notre cœur se donne 

C'est un carré d'amour
Qui s'ouvre en plein ciel
Une fenêtre de gratitude
Sur la beauté des jours

Tu y croises les rayons de l'été
Et la verdeur de l'âme 
Tu caresses du regard chaque fougère 
Chaque sourire chaque matin       

C'est un chemin docile
Aux aspérités du silence
Une simple respiration
Posée sur la patience des heures

Comme c'est vivifiant
Et tendre pour le souffle 
De laisser ainsi monter en soi
La sève de la joie.

Jean Lavoué, 26 juin 2017
Photo JL, Le Blavet, 23 juin 2017














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samedi 25 juin 2022

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Nous visitons trop souvent en aveugles 
Ce royaume dont nous sommes les princes
Et les serviteurs.

Dans le jardin du monde,
Nous voyons à peine trembler sous nos yeux
Le buisson de silence et de vent
Qui nous couronnerait :

Notre île rajeunie,
Nos amitiés solaires,
Notre vie simplifiée,
La table où s'arrimer
Sans craindre les courants,

Nos oiseaux de passage,
Nos chemins visités,
Nos nids dans les courants,
Nos routes sur la mer.

Jean Lavoué, 21 juin 2016
Photo JL Gâvres 20/06/22











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mercredi 22 juin 2022

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Nous voici devenus désormais
Voisins des astres,
Cultivateurs d’inconnu,
Prochains de tous les autres habitants de la terre.

Nous avions oublié le sol qui nous portait,
L’humus qui nous nourrissait,
Mais nous sommes tout à coup réveillés d’un long rêve.

Il nous faut réapprendre ensemble 
À écouter la musique des étoiles,
À parler aux mousses et aux forêts,
À inviter l’aube et l’océan à demeurer chez nous,
À cultiver humblement nos partitions potagères,
À consoler tendrement les cicatrices silencieuses 
De notre mère la Terre.

Jean Lavoué, 21 juin 2015 
Photo Candiix/Pixabay













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samedi 18 juin 2022

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Quelques mots de trois fois rien
Pour tenter de dire l’énigme,
L’arbre dont nous sommes les fruits :

Cette flamme qui dure
Là même où le coup est porté, 
Cette fragilité consentie
Qui n’éteint pas la joie, 

Ce rocher, cet abri,
Cette paix accueillie,  
Cet élan redonné. 

Il n’est qu’un seul amour
Reliant entre nous tous 
La part la plus vulnérable. 

Tributaires de chacun,
Solidaires avec tous,
Nous préservons ainsi
Notre demeure commune,

Ce souffle qui monte de la terre 
Où se renouvelle sans cesse
Le miracle unique de la vie.

Jean Lavoué, 17 juin 2022 
Photo Jancickal/Pixabay














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mercredi 15 juin 2022

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Nous allons sans nous hâter
Vers l’espace ouvert
De nos estives dénudées.

Nous sommes nombreux
À nous éloigner ainsi
Des contrées coutumières. 

Nous quittons les enclos 
De nos saisons sûres
Pour des sentiers inconnus.

Les nuits étoilées
Nous deviennent aussi familières
Que les ciels traversés d’averses et d’orages.

À l’abri du rocher
Nous faisons du silence
Notre demeure.

En nous les heures spacieuses
Se mettent à respirer 
Un printemps unifié.

Notre horizon se couvre
De lumières frémissantes
Et de clartés tremblantes.

Ce que nous ne savons plus nommer
Nous l’éprouvons sous nos pas
Comme un sol nouveau et sûr.

Nos fragilités nous font aimer
Les crêtes inaccessibles 
Et les matins de haute solitude.

Nous vivons chaque jour
Sans nous tromper
À l’aube des émerveillements.

Nous sommes là au plus près
De l’accomplissement du monde
Devenu notre unique célébration. 

Nous nous accordons peu à peu
Au souffle d’une joie libre 
Sans mesure, imprenable. 

Jean Lavoué, 13 juin 2022
Photo Pixabay 

















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dimanche 12 juin 2022

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Nos mots partagés en pauvreté
Nous font toucher leur chair
Plus que les mots en gloire
Autrefois inculqués.

Nous allons sans certitude
De battements d’ailes en pas légers
Vers le sol de notre commune solitude.

Lavés des vérités d’en-haut,
Nous laissons ruisseler sur nous
Les carillons du doute
Et les trouées du silence qui nous espère.

Nulle autorité ne nous convainc plus
Sinon celle qui monte de la terre
Et de nos paroles données,
Brûlées au sel de nos vies.

Nous sommes les témoins patients
De cette absence qui se fait lumineuse
À mesure que le jour se lève en nous.

Nous devenons humbles passants
De ce plus qui nous habite
Et dont nous suivons en nos déserts
Les pas effacés qui cheminent avec nous. 

Jean Lavoué, 9 juin 2022






















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La course reprend, intense,
Vers des temps fructueux,
Du moins, nous l'espérons. 

Nous désirons des fêtes,
Des rencontres fertiles,
Attiser de grands gestes
Les braises de l'amitié. 

N'oublions pas pourtant 
Les clairières du silence,
Les solitudes vives,
Les aires où respirer. 

Tenons-nous aux lisières 
De l'envol et du repos !
Le danger vient de l'impatience :
Il y a tant à rattraper. 

Ne cessons pas de hisser
La voile de nos rêves, 
D'étoiler nos actions d'inutiles levains,
D'espacer nos projets
De vacances généreuses. 

Veillons à nos matins,
Aux éclats de nos deuils,
À la force d'aimer. 

S'arrêter pour trois fois rien :
Quelques notes de musique,
Les premiers mots d'un poème,
Les enfants qui rentrent de l'école,
Les paroles simples du voisin,
La symphonie des fleurs. 

Nous sommes faits pour respirer
Au va-et-vient des vagues :
Il y a trop d'océans en nous
Pour nous mettre à l'abri des vents. 

Trop de soif d'infini
Pour nous fixer aux quais
Du seul négoce. 

Gardons en nous l'esprit
Du lâcher-prise et du retrait.
De temps à autre rappelons-nous :
Tout peut bien s'arrêter,
C'est la vie malgré tout qui l'emporte ! 

Jean Lavoué, 10 juin 2021
Photo Larisa-K/Pixabay













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jeudi 9 juin 2022

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Depuis 2007 sur mon blog l’enfance des arbres www.enfancedesarbres.com, 2014 sur cette page FaceBook et plus récemment sur Instagram, je partage chaque semaine quelques poèmes. Je ressens aujourd’hui le besoin d’une pause ou tout au moins d’un rythme moins fréquent sur ce chemin d’écriture : je puiserai donc plus régulièrement dans les poèmes déjà partagés ces dernières années. Aujourd’hui, un poème de 2015 sur la Bretagne, écho à la chaleureuse table ronde organisée par « Livre et lecture en Bretagne » et animée par Alain-Gabriel Monot à laquelle j’ai participé mardi soir 7 juin à Rennes à propos justement de « la poésie en Bretagne »…
JL

BRETAGNE

Notre terre
N’était pas de soleil ni de feu
Mais de sel et de vent
De rocs anéantis par l’infini sauvage
Et de volcans défaits aux ventres ronds de femmes
En mal de naissance

Nous avions pour colliers
Des nuages d’azur
Des rives brodées d’aulnes
Des rivières sauvages
Des filles du soleil
Des améthystes sur tous chemins
Et la rumeur des cieux qui bruissait dans nos branches

Nous avions des saisons des siècles des marées
Des ferveurs migratoires
De grands oiseaux de mer signant nos territoires
Des sanctuaires aux mousses drues
Et des fontaines accroupies sous les arbres
Et des forêts aux chants vainqueurs

Nous étions de ce pays comme on est d’un vaisseau
Comme on est d’une nef
D’une enfance sauvage aux larmes printanières
Nous étions de ce feu de ce vent de ces astres
Qui nous ensorcelaient tout en nous délivrant

Nous avions des poètes
Des druides matinaux
Des fous intacts et purs 
Des saints brûlés d’exil
Nous fêtions les calvaires
Nous aimions pauvrement
Nous marchions en silence
Nous franchissions des croix
Nous vivions sans le sou
Nous sanctifions les prés
Les talus frémissants d’aquarelles graminées
Tout nous était divin
Nous ne vieillissions pas

Jean Lavoué, 6 juin 2015














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