Vienne le temps de l'arbre
Dont la langue des signes
Épouse en grand secret
Les gestes silencieux du vent
Vienne le temps de la rivière
Ouverte à tout nuage
Tout fragment d’herbe abandonné
Tout ciel ténébreux
Toute aile d'oiseau endormie
Vienne le temps de nos méditations muettes
Éprises d'un rien
D'un chant écartant les rideaux de la nuit
D'un mot agile dansant sur l'abime
Vienne le temps de nos rives étonnées
Capables de se répondre et de s'écouter
Sans pourtant se confondre
Ni jamais se rejoindre
Vienne le temps de nos estuaires sans retour
De nos abandons stellaires
De nos nuits illuminées
De nos envols vers l'inconnu
Vienne le temps de nos cicatrices
Par où s'engouffre la lumière
Vienne le temps de nos battements d'ailes
De nos matins tremblants
De nos vides triomphants
Vienne le temps de nos espaces sans frontières
De nos marches accueillies
De nos pèlerinages vers le mystère
Vienne le temps de nos visions partagées
De nos vulnérabilités natives
De nos insécurités traversées
De nos tendresses repeuplées
Vienne le temps où nul ne sera mieux vêtu
Qu'une fougère éblouissante
Dans le jardin de mai
Viennent le temps où nous aurons semé
Où nous aurons donné
Où nous aurons appris à défricher nos rêves
Vienne le temps où le temps nous sera comptable
De nos graines enfouies
Et de nos
cœurs dilapidés !
Jean Lavoué