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vendredi 31 mai 2019

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Marcher au pas d’une forêt,
C’est glaner pour la vie des gerbes de silence,
C’est quêter immobile des plages de lumière,
C’est se tenir debout dans le feu des clairières,
Se sentir traversé par un peuple aux frontières,
C’est ne pas oublier que le printemps nous fonde,
Que nous sommes vivants d’une grâce infinie,
C’est chercher sans pourquoi dans l’océan des branches
La source du grand vent et la voile en partance,
C’est ne rien regretter de tous ces jours enfuis :
Seulement être là en promesse de Vie.

Jean Lavoué, La Chesnaie, 21 mai, lundi de Pentecôte 2018
Photo Aïcha Dupoy de Guitard


































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mercredi 29 mai 2019

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Merci Marie Carof-Gadel pour cet article publié ce 29 mai dans Ouest-France !





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mardi 28 mai 2019

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Rien à faire,
Le vent te veut dehors
Pour t’abreuver d’enfance ;
Il te veut debout tutoyant les étoiles
Aussi précis qu’un arbre
Pour glaner en tes branches
Ses bourrasques,
Ses silences.

Le vent te veut pour une fête
Dont tout porte le chant :
Aussi nu que pierre,
Aussi léger que graminées emportées dans son souffle ;
Il te veut sans partage
De toutes les saisons dont il est le vainqueur,
Le berger pacifique.

Le vent te veut désarmé,
Lavé des certitudes,
Sans bouclier ni doctrine,
Ici même présent
Dans l’instant du dévoilement ;
Il te veut pour une communion
Sans sceau ni empreinte,
Dans la danse des âmes
Offerte à tous passants.  

Le vent te veut oublieux de la mort
Pourtant compagne de chaque pas,
Plongé dans la source de vivre,
Immergé par la main des courants ;
Il te veut gardien des promesses
Dont il signe chaque battement de cœur,
Chaque lueur sur ta route,
Chaque étonnement,
Chaque abandon enfin tenu.

Le vent te veut d’une demeure
Livrée aux oiseaux de mer,
Sans portes ni fenêtres,
Aux linteaux bénissant ;
Il te veut pour une traversée sans cap ni retour
Où il indique seul à chacun les passages,
Les gués pour se perdre,
Les tracés magnifiques.

Le vent te veut pour une Bretagne des confins
Balbutiée par les éclats de l’aube ;
Il te veut pour une cantate neuve
Fière de ses eaux franchies,
Pour un cortège en partance,
Dénué de ses peurs,
Aux larmes fraternelles,
Aux rires éblouissants.

Le vent te veut pour un baptême des limites
Aux rives fracassées d’amour ;
Il te veut pour un alléluia torrentiel
Aux immenses ailes déployées,
Un envol vers les îles,
Un feu que chacun porte en soi.

Jean Lavoué, Le Blavet, 27 mai 2019
Photo Le Télégramme, Saint Jacut de la mer

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dimanche 26 mai 2019

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C'est le chant d'une enfance que tu nous as donné, Yann-Fañch,
Le chant d'une enfance pauvre
Où la joie allait malgré tout sa danse
Sur ses chemins de fête,

Le chant d'une enfance en deuil,
Fraternelle,
Où il te fallait vivre pour ceux parmi les tiens qui n'en eurent pas la chance
Et bientôt pour tant d'autres aussi,

Le chant d'une Bretagne humiliée,
D'une langue défaite
Que tu hisserais un jour telle une hymne souveraine
S'élevant du très-fond d'elle-même,

Le chant d'un pays défiguré,
Aux talus arasés
Dont tu ferais revivre dans le cœur de chacun
Le bondissement des sources,
Le frémissement des feuilles,
De places de villages en fêtes de nuit,

Le chant d'une terre
Dont les hommes et les femmes
Payèrent si lourd tribut à la guerre,
Et dont tu voulus par le récit rebelle de la vie du grand-oncle
Honorer la mémoire et la dignité de tous,

Le chant d'un secret
Dont tu es a jamais le gardien
Mais que tu as su transfuser dans nos âmes
Par le miracle de ta voix,

Le chant d'une histoire oubliée
Que tu as ressuscitée dans nos cœurs,
Le chant d'une amitié,
D'une mémoire exacte,
D'une flamme transmise,
D'un poème sans défaut,

Le chant d'un amour éperdu
Pour la bonté cachée dans l'homme
Qu'à force de persuasion et de patience
Tu savais réveiller,

Le chant d'un courage
Dont nous sommes tous témoins
Et que nous gardons en nous
Comme preuve de cet amour
Qui, jusqu'aux dernières lueurs de l'aube,
Ne t'aura pas quitté.

Jean Lavoué, 21 mai 2019


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vendredi 24 mai 2019

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" Je ne demande pas grand-chose, juste un peu d'amour, pas même le grand amour de nos jeunesses, mais un regard, un geste, un mot où je me sente exister "
C'est en ces mots que s'est terminé l'entretien avec une personne charmante toute en douceur et rondeurs, délicatement parfumée et vêtue avec soin.
Il y avait une élégance en elle qui n'osait plus lever le ton pour exiger satisfaction, une tristesse se résignant à vivre de peu et cette petite flamme persistante qui sentait qu'exister lui était nécessaire.
C'est par ce nécessaire que la Joie a tenté l'issue comme on suit le souffle ténu d'un nouveau-né.
Elle est allée au plus simple, poser le regard sur une broche illuminant sa poitrine et que souvent sa main effleurait en parlant.
Se sentait-elle exister au contact du bijou ?
Il y avait derrière ce geste un gouffre profond, un torrent de larmes, une attente vaine et les trahisons répétées de cet autre en qui se loge l'espoir d'amour depuis le tout premier regard en chaque être humain.
Le geste pourtant, naturel et simple, qu'elle posait systématiquement en parlant de sa souffrance ne désignait que ce centre en elle d'où part le regard sur le monde, faisait retour inlassablement vers ce centre comme une main tendue vibrante de désir, animée du souffle vital.
Elle avait déjà parcouru un long chemin, cherchant l'impossible réponse auprès de communautés religieuses ou philosophiques, à travers des engagements humanitaires et son métier d'infirmière ne semblait souvent montrer que la profondeur de la blessure en chacun.
Le bijou avait appartenu à sa grand-mère, il avait été objet de convoitise de l'enfance, intimement lié aux soins et aux sourires et lui était revenu en héritage au milieu de sa trentième année. Elle disait le porter par principe suivant une coutume familiale sans attachement particulier tout en précisant que de cet au-delà, où peut-être cette parente était, elle pouvait se sentir aimée.
Quelle était donc la barrière ouvrant, dans l'ici et le maintenant, l'impossible amour ? Serait-ce la focalisation du regard tourné vers l'extérieur et que le geste ramène sans cesse à l'intérieur ?
Nous n'avons pas trouvé la réponse en discutant plus longtemps, nulle recherche n'était nécessaire pour sentir le nœud doucement se défaire et la brise légère traverser nos demeures comme un petit enfant court après des bulles de savon, avec ce détachement particulier que prend le doute quand il tient la main d'espérance.
Lise, auteure de « Matins de tendre espérance », L’enfance des arbres 2019
Photo KHphotography/Pixabay

jeudi 23 mai 2019

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C’est la parole
Sur le point de se taire
Que tu voudrais saisir,

Son sillage :

Perle, filet, poisson,
Ou encore levain, semence,
Arbre, nid.

Tu cherches l’île au fond,
Et le passage secret
Que tu empruntais quelquefois
À pied sec,

Le livre posé sur le cœur,

Ce poème qui parlait d’un royaume
Tandis que les oiseaux de mer,
Au fond de toi
Triomphaient.

Jean Lavoué, Carnets du souffle, poèmes inédits 2007 – 2010
Photo Pexels/Pixabay
































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