" Je ne demande pas grand-chose, juste un peu
d'amour, pas même le grand amour de nos jeunesses, mais un regard, un geste, un
mot où je me sente exister "
C'est en ces mots que s'est terminé l'entretien avec
une personne charmante toute en douceur et rondeurs, délicatement parfumée et
vêtue avec soin.
Il y avait une élégance en elle qui n'osait plus lever le ton
pour exiger satisfaction, une tristesse se résignant à vivre de peu et cette
petite flamme persistante qui sentait qu'exister lui était nécessaire.
C'est par ce nécessaire que la Joie a tenté l'issue
comme on suit le souffle ténu d'un nouveau-né.
Elle est allée au plus simple,
poser le regard sur une broche illuminant sa poitrine et que souvent sa main
effleurait en parlant.
Se sentait-elle exister au contact du bijou ?
Il y avait derrière ce geste un gouffre profond, un
torrent de larmes, une attente vaine et les trahisons répétées de cet autre en
qui se loge l'espoir d'amour depuis le tout premier regard en chaque être
humain.
Le geste pourtant, naturel et simple, qu'elle posait systématiquement
en parlant de sa souffrance ne désignait que ce centre en elle d'où part le
regard sur le monde, faisait retour inlassablement vers ce centre comme une
main tendue vibrante de désir, animée du souffle vital.
Elle avait déjà parcouru un long chemin, cherchant
l'impossible réponse auprès de communautés religieuses ou philosophiques, à
travers des engagements humanitaires et son métier d'infirmière ne semblait
souvent montrer que la profondeur de la blessure en chacun.
Le bijou avait appartenu à sa grand-mère, il avait été
objet de convoitise de l'enfance, intimement lié aux soins et aux sourires et
lui était revenu en héritage au milieu de sa trentième année. Elle disait le
porter par principe suivant une coutume familiale sans attachement particulier
tout en précisant que de cet au-delà, où peut-être cette parente était, elle
pouvait se sentir aimée.
Quelle était donc la barrière ouvrant, dans l'ici et le
maintenant, l'impossible amour ? Serait-ce la focalisation du regard tourné
vers l'extérieur et que le geste ramène sans cesse à l'intérieur ?
Nous n'avons pas trouvé la réponse en discutant plus
longtemps, nulle recherche n'était nécessaire pour sentir le nœud doucement se
défaire et la brise légère traverser nos demeures comme un petit enfant court
après des bulles de savon, avec ce détachement particulier que prend le doute
quand il tient la main d'espérance.
Lise, auteure de « Matins de tendre espérance »,
L’enfance des arbres 2019
Photo KHphotography/Pixabay
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