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dimanche 30 octobre 2011




"L'éternité est le plus proche du temps. Voir mourir ceux que nous aimons est atroce : Dieu m'a déjà fait ce cadeau empoisonné plusieurs fois. Mais une vérité y perce (comme un poignard, une épée?), rayon d'or qui vient nous frapper en pleine poitrine pour nous redresser vers ce qui ne passe pas... L'amour va jusqu'aux étoiles, il traverse la mort, ou bien ce n'est pas l'amour. Mon amour ne meurt pas avec moi, l'amour de ceux qui m'ont donné leur amour ne meurt pas avec eux : il continue, autrement, dans un espace et un temps plus vrais. Expérimenter cela est la béatitude elle-même... La béatitude est l'expérience d'une joie qui n'est pas de ce monde : elle est trop vraie pour être de ce monde, elle la vérité outre-monde de ce monde, sa transfiguration réussie."

Bernard Sichère
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Matins de larmes où la joie affleure, ne vous effacez pas ! Ou du moins laissez tremblante encore la lueur qui vous allait si bien. Matins de douleur quand le ciel a des accents qui ne trompent pas. Posez les mains sur mes tempes et sur mon front. Ravivez ainsi la tempête apaisée. Guérissez l’absence. Guérissez-là de l’oubli mais non de ce vide lumineux qu’elle a laissé en nous.

JL







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samedi 29 octobre 2011

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Oh ! La présence, puissions-nous l’éprouver encore, d’instants en instants ! Ce ciel, ces arbres, ces éclats de la lumière sur la peau des jours. Cette incroyable transparence des visages, ouvertures sur un paysage qui n’a pas de fond. 

Cette forêt inimaginable que la pierre des tombes recouvre mal, nous la portons en nous. Nous la célébrons. Ces éclats de lumière que la mort refuse où donc ont-ils leur demeure si ce n’est dans les trouées du cœur ?

JL







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vendredi 28 octobre 2011

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Jamais sans la souffrance, jamais sans l’apprivoisement de la mort et du deuil : la joie ! Traversée de toutes les illusions et cependant le chant demeure. Voilà ce que n’ont cessé de murmurer à nos oreilles poètes et prophètes de toutes traditions. Ils savaient la vie plus forte que la mort et c’est pourquoi leur chant ne nous quitte pas. Il nous revient aussi de le transmettre en en faisant pour nous-mêmes et pour chacun un poème neuf. C’est à cela qu’est suspendu notre souffle. Ne l’oublions pas !

JL







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jeudi 27 octobre 2011

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Il est des rencontres qui se passent presque de mots, mais non pas de connivence, de transmissions secrètes dans la ferveur des silences. Comment s’ouvrir tout entier à la fécondité de tels engrènements ? Par la disponibilité au Poème. Sans retenue. Confiance aveugle parce que les mains d’amour ont déjà touché le cœur.

JL







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mercredi 26 octobre 2011

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Ainsi du Poème de l’Evangile, poème des poèmes… Rien n’est figé, rien n’est arrêté. Seul un grand mouvement de surrection qui ne finit pas. Jaillissement sans fin. Comme une hémorragie du cœur blessé qui pourtant n’en finit pas de battre. Et nous vivons encore, vingt siècles plus tard, l’oreille collée contre sa paroi puissante et généreuse. Un monde vient de naître et il n’en finit pas de venir au jour. Nous restons les témoins incrédules de cette gestation qui n’aura de cesse de s’accomplir.

Comment se transmet le Souffle ? Non par la puissance, non par des certitudes assénées, mais par la transfusion de bouche à bouche, de cœur à cœur. Voilà comment nous rejoint le Poème. Voilà comment il nous retourne et nous transfigure. Il s’agit de retrouver ce surgissement du souffle et d’habiter son lieu. Pas de commandement de l’extérieur pour cela mais un éblouissement de l’être dans la germination des matins.

JL







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mardi 25 octobre 2011

Lac de Tibériade, 2007
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Rejoindre le Poème à sa source : en ce qu’il ne nous dit pas, nous ignorant. Et pourtant comment cela se fait-il qu’il nous émeuve tant, nous touche et nous bouleverse ? Quelle est cette prégnance qui nous atteint à la racine ? Cette consubstantialité, comme si soudain l’âme et le corps n’étaient plus séparés ; ce qu’ils n’ont d’ailleurs jamais été mais que l’on a cru : de ces fausses croyances le Poème tout à coup nous arrache, nous fait boire directement à la source.

JL







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lundi 24 octobre 2011

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Le même mouvement s’est déroulé au sein des religions d’Orient, en Inde, en Chine ou au Japon, de dépouillements en dépouillements, à l’égard des codes religieux et des rites de l’origine, vers des dépouillements qui n’auront pas de fin. Le Bouddha lui-même, du lieu de son éveil, s’adresse à tout homme, à tout disciple, l'invitant à se mettre lui-même en quête de cet éveil et à se libérer de toutes séparations instaurées notamment par les rituels et les castes. Le bouddhisme Ch’an inspiré du Tao, puis le zen, puis les traditions spirituelles de l’Orient transmises au vingtième siècle à l’Occident, réinventeront sans cesse, dans le geste même de la transmission, l’acte de libération première du Bouddha surgissant dans un geste de totale liberté intérieure à la voie du plein éveil.

JL








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dimanche 23 octobre 2011

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Cesser de vouloir dominer de toute la force de sa raison infirme, se montrer seulement attentif aux infimes sensations du corps ; l’esprit entièrement mis au repos, toutes pensées, toutes distractions n’étant que nuages passagers, papillons du désir qui s’échappent et qu’on ne retient pas. « Se tenir comme un arbre » enseigne au fil des jours, des mois, des années le patient « dénouement » des tensions, la détente profonde, tandis que l’esprit reste en éveil, disposé à l’ouverture de tout l’être dans la juste présence. Chasser la pensée close, les certitudes, entrer dans la voie du paradoxe, c’est la route joyeuse. La bonne nouvelle est dans cet arrachement à toute clôture du corps et de l’âme dont le Temple était pour le Christ la plus nette expression. Sa résurrection est son échappée vive, hors du tombeau de la religion dont il n’a cessé de dénoncer l’hypocrisie des sépulcres blanchis.

JL








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samedi 22 octobre 2011

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Ce « vivre » paradoxal que la raison n’épuise, comment s’y déployer ? Cette sagesse qui ne vise aucun but, aucune finalité si ce n’est d’épouser avec adéquation le geste de vivre qui n’est, au fond, ni un geste, ni un temps, mais un rythme insoupçonné. Se tenir en témoin silencieux, rivé à la source : voilà le commencement de toute sagesse, de toute spiritualité, de toute philosophie.

JL







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vendredi 21 octobre 2011

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Comment quitter le règne illusoire des finalités pour s’en remettre au souffle qui habite toute chair ? Cela que l’Orient sait depuis toujours, il a fallu sans cesse de petits et de grands prophètes inspirés, comme de petits et de grands saints, pour le redonner à un Occident qui n’a cessé, lui, de s’ériger dans le même temps dans ses certitudes et sa volonté de puissance. Jusqu’à conduire le monde vers l’abîme. Mais non pas l’abîme qui fonde toute spiritualité authentique d’Orient ou d’Occident ; plutôt l’abîme chosifié que le philosophe Martin Heidegger n’a cessé, par exemple, tout au long de son œuvre de mettre au jour sous le règne de la technique recouvrant l’être-là de l’humain. 


Pourtant l’énigme demeure et résiste la flamme qui ne se laisse pas entièrement griser par l’illusion des finalités et des certitudes ayant fini par donner aux sciences et aux techniques ce caractère de destin incontournable où se perd l’humain. Cette flamme grandit à mesure que grandit le péril. Se réveillent de toutes parts sur la planète les foyers qui lui redonnent force et vigueur. Les religions dans leur ritualisme figé en sont bouleversées. Le souffle est ce qui jaillit des entrailles de l’humain pour le saluer et le sauver, l’arracher aux illusions qui le déportent. Face au danger, la main du Dieu qui s’est retiré n’a jamais tenu avec une telle force, une telle intensité, une telle prière silencieuse et continue celle de l’humain au cœur de l’humain.

JL









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jeudi 20 octobre 2011

Le Jourdain à sa source...
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C’est à être ancrée dans son long processus de transformation continue que la tradition spirituelle occidentale qui a davantage mis l’accent sur ses ruptures que sur ses continuités, ses événements fondateurs que sur ses héritages transformés, peut entrer en phase avec cette profonde pensée d’Orient, ou, mieux encore que « pensée », avec cette expérience sans fond, ni fin du « vivre ».

JL








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mardi 18 octobre 2011

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« Nourrir sa vie » consiste d’abord à demeurer intégralement dans son mouvement, son processus, sa transformation indéfinie. Le bouddhisme Chan ou Zen a su s’enrichir au confluent de ces deux mondes : celui de la métaphysique de la non-dualité hindoue qui constitue un pont avec les traditions mystiques les plus profondes de l’occident auxquelles n’ont cessé de se ressourcer également les philosophies ; et celui du tao chinois, de la Voie qui consiste à se mettre à l’école du grand processus qui emporte toute vie dans un mouvement de danse incessant auquel rien n’est étranger : ni mort, ni naissance, ni joie, ni douleur, ni paix, ni guerre… Seule l’harmonie entre donner et recevoir témoigne de la force d’un processus vivant, justement nourri.

JL







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lundi 17 octobre 2011

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La vie serait elle par elle-même « éclairement » si on la laisse faire ? Mais tant de retenues, tant de désirs l’entravent. Comment n’être plus séparés ? L’Inde ouvre la voie de la non-dualité : immersion dans un abîme sans fond. Demeure encore la tentation de la métaphysique du néant et de l’absolu confondus. Echos profonds et multiples de la grande voie de la mystique négative d’occident, de Maître Eckhart à Jean de la Croix. La Chine parle d’une autre voix, d’une autre langue, entièrement accordée au processus indéfiniment multiple, ambigu et mouvant du « vivre ». Là, pas d’autre mystère que d’être soi-même l’habitant et la demeure du « vivre ». Comment occuper entièrement ce geste continu ?

JL







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dimanche 16 octobre 2011

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Eclairer d’un autre jour le mystère. Non d’une révélation, non d’un dévoilement, mais d’une montée en puissance de la clarté qu’il recèle, par lui-même. Plutôt laisser venir au jour. Sans forcer, sans pouvoir, sans vouloir, mais d’une attente confiante, entièrement donnée.

JL








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samedi 15 octobre 2011


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Apprendre à regagner continument ces profondeurs. Tant de vents nous agitent. Retrouver sans cesse ce soleil intérieur. Le murmure très fin d’une brise légère. Miracle de l’âme rendue à elle-même. Brisure du cœur. L’écriture sera cette coulée douce du souffle sur les rivières. Nous irons à la mer sans larmes, sans éclats. Nous ne reculerons pas quand montera le vent des salines. Nous verrons nos bateaux en fête bien avant de toucher l’océan. Nous saurons nous tenir silencieux tout près des saules de l’enfance. Nous n’attendrons plus rien. Nous serons à jamais de tous les départs. D’immenses vols d’oiseaux croiseront nos rivages.  Nous arpenterons ces cieux comme des marins sans âges. Ces clartés déchirées qui tout au long des ans nous firent tant défaut. Nous resterons sans voix face au soleil levant. Nous souvenant des noces en nos vastes bohèmes. Musiciens sans le sou et privés d’instruments.

JL







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vendredi 14 octobre 2011

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Clartés sauvages que nous n’arraisonnerons pas. Bouleversement des secondes et des heures. Le temps est sans après. Nous n’avons vécu que pour cet instant là. Il n’y a plus de nous. Nous ne sommes pas séparés. Etre au monde était-ce sous ce signe-là ?

JL







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jeudi 13 octobre 2011

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Retour aux cahiers de l’intériorité pour baliser encore la voie. Pas de rythmes inutiles. L’inspire et l’expire pour tous bagages. N’être plus rien que Cela qui se tient là devant. Pure ouverture et pure attente délivrée de tout. Chercher encore à dire avec de pauvres mots la présence essentielle.

JL







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mercredi 12 octobre 2011

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Retour à l’exercice. Centre de gravité. Arrêt des dispersions. Célébration du silence. Se tenir en un profond recès. L’écriture comme une respiration. Rien n’est dû. Tout est gratuit. Enseignement sans mots. Lumière sans déclin. Marcher sur les pas de l’aube. Arbre debout qui ne cesse d’avancer. Clarté dans les branches. Elan. Le ciel a des éclats qui ne trompent pas. 

JL







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mardi 11 octobre 2011

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Inutile de s’avancer vers ce lieu si l’on ne l’a pas d’abord conçu comme le non lieu qui nous fonde. Un territoire privé d’espace mais non pas de matière et de chant. Accepter de ne rien dire de plus que ce matin couronné. Affamer sa peur jusqu’à ce qu’elle s’ouvre sur cette carrière sans fond. Ne pas chercher d’ailleurs à cette salutation : comme un battement d’ailes dont on pressent en soi le frôlement.

JL






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dimanche 9 octobre 2011

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Un jour la fête sera sans pourquoi.  Nous serons convoqués par ce rire qui célèbre. Balbutiements aux confins d’une porte étrangère ouvrant sur le dedans. Toute rupture sera consacrée. Il en ira comme de ces sauts dans l’écriture où l’on ne sait plus très bien ce qui advient. Et pourtant rien ne rompt la trace sacrée. Ce sera ainsi dans ce royaume de la parole que le signe sera donné.

JL






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jeudi 6 octobre 2011

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Inutile de vouloir saisir ce qui ne s’étreint pas. Et pourtant c’est ici, en présence, sans même pouvoir le cerner. Comme une grande capitulation de tout vouloir au moment  même où cela surgit, inconnu. Une acceptation sans retenue et sans volonté propre. Douce renonciation à ce qui s’impose. Tendresse pour tout ce qui se donne.

JL






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mercredi 5 octobre 2011

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Y aura-t-il parole plus neuve que celle qu’un jour tu entendras aux lisières de ta voix ? Quand pas un mot encore ne sera prononcé. Y aura-t-il chemin plus désirable que celui-là que tu ne pourras suivre qu’à reculons, sans voir le but ni l’orée. Seulement docile à la lumière qui surgit du dedans. Sans éclat. Telle une source imperceptible, proche, tamisée. Jamais la présence n’aura manqué à ce point ; et jamais tu ne l’auras ressentie avec une telle intensité.

JL






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mardi 4 octobre 2011

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Nous parcourrons encore bien des étendues avant de nous trouver devant ce seuil qui ne précède aucune nef mais embarque directement sur la haute mer de notre désir enfin renoncé car ayant trouvé l’espace de son repos. Porté en vastes solitudes par des courants ouverts à toutes présences. Renonciation douce en fait car dénouement de tout ce qui empêchait la clarté de parvenir jusqu’à soi.

JL






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