Jérusalem, avril 2007
Atteins en toi
Ce noyau de gravité
Qui t’allège
De tant de poids
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Blog Jean Lavoué "Saviez-vous que les arbres parlent? Ils le font pourtant! Ils se parlent entre eux et ils vous parleront si vous écoutez." Tatanga Mani, Pieds nus sur la terre sacrée... "Il faut reboiser l'âme humaine." Julos Beaucarne
Toute chose naît
D’être séparée
Que serions-nous
Sans cette blessure
A la racine
"Les blessures sont des nids de fleurs.
Las heridas son nidos de flores."
Antonio Porchia
Embrasser l’arbre
Disent les taoïstes
Et ils contiennent le vide
Comme si au cœur
De l’arbre de la croix
Coulait la sève de la vie
Sans attention patiente
Comment laisserais-tu croître en toi
La Source que tu ignores
Comment en percevrais-tu l’éclat
Sur toutes choses rencontrées
.
Tout au bout de ce chemin
C’est Pâques
Mais que sais-tu des longues nuits
Pour y parvenir
Pas d’illumination
Qui ne jaillisse du vide du tombeau
C’est comme si écrire ou prier
Te donnait ainsi qu'à l’arbre
Le signe de la stabilité
Un sourire
Dont le feuillage
N’en finit pas de trembler
Parfois tu crois l’automne venu
L’hiver
L’arbre ne portera plus de fruit
Et c’est alors qu’il te faut entrer
Dans l’infini patience des commencements
Confiant que tout au bout
Habite un printemps
Chaque jour
Rejoindre pour un moment
La patience de l’arbre
Sa vigueur
Sa stabilité
Son total abandon
Main ouverte
A la force qui le tire
Au-delà de lui-même
La force de durer
Non volontaire mais choisie
Familière du silence
Et de la longue attente
Battant au même rythme
Qu’un cœur qui se serait mis
A aimer le temps
C’est dans le vide qu’il creuse
Que l’arbre trouve la force
De se tenir debout
Entre ses branches et ses racines
Le ciel ni la terre ne s’élargissent
Mais cette fermeté en lui
Pour les accueillir
Nul n’est propriétaire
La terre est une patrie
En avance sur notre mort
Qui reste à devancer
Elargis
Elargis l’espace du silence
Assouplis les jointures
Un jour
Tu entendras sous l’écorce
Tous les bourgeons craquer
Y avait-il un nom
Au bout de ce silence
Un visage
Au fond de cette nuit
Y avait-il une main
Pour contenir ce vide
Une présence
Pour accompagner
Trouve en toi la fissure
Le point d’incohérence
La ligne effondrée
La joie finira bien
Par glisser ses racines
Entre les pierres
A ta fenêtre
Ce morceau de ciel
Cet arbre implorant
Suffisent à ta joie
L’univers est entier
Et l’oiseau
Près de toi
Partir
S’en aller
Communier au feu sous l’écorce
Souverain dénudé
Pauvre de sa royauté blessée
Abandonné au moindre souffle
Portant la passion des jours
Capable de racines et de feuilles
Dans le même instant
Les cicatrices
Sont des fruits arrachés à la mort
Soleils qui nous font éprouver
La plénitude de vivre
Toutes les forêts du monde
Conduisent au désert
Il suffit simplement
De laisser le soleil s’approcher
Décidément la clairière
Un lieu où respirer
La page blanche où le poème s’efface
Comme un silence stellaire
L’espace entre deux notes
Qui se cherchent
Se déchirent
Un vide qui peut-être inaugure
Nul de plus désencombré que toi
Arbre mon frère
Elle n’aura rien à prendre
La voyageuse
Chaque automne dépouillé
De ta prophétie de feuilles
Neuf à chaque printemps
Tel la pousse d’un palmier
Jailli du long désert
Le poème peut être dur
Plus dur que l’écorce
Protégeant la sève
Ceux qui s’enferment
Dans un trop plein de rites
De concepts
De mots
De certitudes
Comment ne les plaindrais-tu pas
S’ils n’empêchaient tant d’autres
De respirer la parole
"Cette maison, dans les peupliers blancs,
Où j’habitais avec les braises,
Serait-elle demain la commune maison
Du règne et du royaume ?"
Jean-Claude Renard
La joie de se tenir debout
Vivant
Sans amertume
Passible de lumière
Et de ruissellement sous l’écorce