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mardi 1 octobre 2019

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L’automne est arrivé et avec lui mon livre sur René Guy Cadou désormais disponible.
Aujourd’hui, cette note de Pierre Tanguy à son sujet…

     Jean Lavoué : « René Guy Cadou, la fraternité au cœur »

    La poésie de René Guy Cadou (1920-1951) n’en finit pas de susciter des commentaires émerveillés. A l’occasion du centenaire de sa naissance à Sainte-Reine de Bretagne, l’écrivain et poète breton Jean Lavoué – il vit à Hennebont - nous livre son Cadou intime.

   La fraternité est au cœur du livre de Jean Lavoué. Auteur d’un Perros, Bretagne fraternelle (éditions L’Ancolie, 2004), il récidive en quelque sorte dans ce livre sur René Guy Cadou. La fraternité, en effet, parcourt ce livre. Fraternité de René Guy avec ses amis poètes et écrivains de l’Ecole de Rochefort, cette école buissonnière d’auteurs en rupture avec le surréalisme et prônant le retour à la nature et à l’émotion. Fraternité avec le poète Max Jacob. Fraternité avec le Père Agaësse, moine  bénédictin de l’abbaye de Solesmes. Fraternité avec Michel Manoll, le libraire nantais qui l’introduisit dans le monde de la poésie… La liste est longue.
  
    Cette fraternité trouve sa source, estime Jean Lavoué, dans la figure quasiment « christique » de René Guy. Car si Cadou n’était pas chrétien, il avait au cœur ce Dieu incarné qu’il entrevoyait comme le frère de tous les hommes, un Dieu loin des dogmes et des pesanteurs de l’Eglise officielle. René Guy Cadou avait-il dans sa poche gauche une carte du Parti communiste et dans sa poche droite une médaille de saint Benoît (que lui avait offerte Max Jacob quand il lui rendit visite à Saint-Benoît sur Loire) ? On peut en tout cas l’envisager, comme le fait Jean Lavoué, nous rappelant au passage que le curé de Louisfert, où mourut le poète, lui refusa des obsèques religieuses. « Seigneur ! Me voici peut-être à la veille de te rencontrer. Il fera nuit, je serai là debout à la barrière du pré », écrivait pourtant Cadou pressentant sa mort prochaine. « Je crois en Dieu parce qu’il n’y a pas moyen de faire autrement ».

  Jean Lavoué développe, à ce propos, un thème qui lui est cher et parcourt ses propres livres : celui de l’exode. Il voit dans l’œuvre de René Guy Cadou des traces de cette approche de la vie qui fut celle de Jean Sulivan, d’Etty Hillesum  et de tant d’autres, notamment les mystiques rhénans, à savoir « cet exode du christianisme religieux pour mieux nous redonner sa sève dans l’intensité d’une intériorité vécue et d’une donation dans la chair du monde ».
   L’auteur estime donc que Cadou a beaucoup à dire aux hommes de notre temps. Il n’hésite pas à parler, à propos de son œuvre, de « 5e Evangile  destiné au monde non religieux dans lequel nous sommes entrés », car « la poésie fut pour lui cette vie entière, cette vie rêvée, cette écriture vouée à l’autre et à l’amour, à chaque instant ».

   On ne peut pas, pour autant, réduire ce livre à une approche du Cadou « christique ». Jean Lavoué insiste beaucoup, au début de son livre, sur la double identité du poète : la sienne propre d’une part et, d’autre part,  celle de son frère Guy décédé huit ans avant sa naissance et dont le prénom a été accolé au sien (René devient ainsi un « Re-né »). Double identité porteuse d’interrogations, lourde de sens  sur le destin individuel et sur la mort. Jean Lavoué souligne également – et on ne s’en étonnera pas -  le rôle éminent joué par Hélène, son « amoureuse », auprès de lui. « René se plaira d’ailleurs à signer nombre de leurs correspondances communes « Renélène »… la fusion est parfaite ».

      Cette lecture particulière de l’œuvre de Cadou amène Jean Lavoué a expliciter sa démarche : « Je ne m’adresse pas ici aux spécialistes. Derrière le poème de Cadou, c’est le Poème que je cherche avant tout à faire entendre », car « il nous parle de l’Homme (…) De l’homme que nous sommes appelés à devenir ».
    Ce livre n’a donc rien d’une thèse universitaire ou d’un exercice littéraire. C’est plutôt, comme le dit l’auteur, « une sorte de libre cheminement autour de ce qui révèle la destinée d’un poète dont la vie se confond avec l’œuvre : brèves comme une étoile filante dans la nuit mais suffisantes à dire l’éclat d’une existence vécue dans le déchiffrement obscur de l’énigme qui la fonde ».
    Le poète instituteur René Guy Cadou est mort le 25 mars 1951. Il avait 31 ans. Des enfants de son école apportèrent des bouquets de primevères près de son cercueil.

                                                                                            Pierre TANGUY.

René Guy Cadou, la fraternité au cœur, Jean Lavoué, préface de Ghislaine Lejard, postface de Gilles Baudry, éditions L’enfance des arbres, 300 pages, 20 euros.




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