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jeudi 27 février 2020

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PRÉSENCE

Si le tableau s'efface, si tu n'es plus au centre, 
Peut-être t'apprêtes-tu 
À entendre autrement la rumeur
Qui monte de chaque chose ;

Là où était le chant
Peut-être n'y a-t-il plus qu'écoute sans attente,
Poème sans dessein, accord sans mélodie,
Tonalité première,

Brûlure d'une promesse à jamais accomplie.
Là où tu te croyais témoin, regardant sans oubli, 
Se tient désormais l'Ouvert,
Affranchi de toute prise. 

C'est un parfum inconnu,
Une tonalité nouvelle qui surgit maintenant de l'arbre, de la maison, 
Du ciel où s'abriter, de la prairie en fleurs
Élevant vers toi ses pentes lumineuses.

La flamme, la cheminée, la pomme sur la table,
Le bouquet de forsythia en feu au coin de l'escalier 
Accourent sur la toile, te devancent ;
Les meubles cirés, les cuivres, tu ne les vois plus comme objets 
Mais comme tremblements d'une éclaircie qui te précède. 

Gratitude infinie de l'être
Qui trouve ainsi sa clairière
Où, sans peur ni dommage, il peut se fondre et disparaître
Dans l'abandon à tout lever du voile, toute offrande des couleurs.

Dans l'entralecement des branches de la vie,
Plénitude d'avoir été Cela,
Un seul instant, où les forces convergent, 
Où toute durée s'abolit.

Cœur pensant du monde offert
Sans raison ni autre nécessité
Que d'avoir laissé s'ouvrir en lui
Ce lieu sans lieu vers lequel se donne enfin toute présence.

Jean Lavoué, 25 février 2020
Paul Cézanne, Montagne Sainte-Victoire





















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