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dimanche 22 mars 2020

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CRISE, DANGER ET CHANCE

Soudain la machine tourne à vide,
La terre respire enfin ;
Une clef minuscule a pris possession de nos secrets les mieux gardés,
Nous a mis à genoux : 
Et nous voici calfeutrés,
Craignant partout l'intrusion d'un ennemi invisible.

Le monde a peur, 
Certains souffrent plus que d'autres,
Mais, paradoxalement, notre planète vit une sorte de cure de repos.
Nous craignons pour nos proches vulnérables
Et aussi pour nous-mêmes,
Tout ce qui allait de soi est soudain devenu si difficile,
Mais pourtant le ciel déjà s'éclaircit :
Nous aussi, au fond, ne respirons-nous pas mieux ?

Notre activité est au repos ;
Pourra-t-elle reprendre et surmonter cette lente léthargie ?
Tant d'efforts accumulés soudain mis à mal,
Nos monnaies et nos empires défaits...
Mais les arbres, les oiseaux, les insectes ont à nouveau une chance inouïe :
L'air pur leur est grâcieusement redonné !

Tout redeviendra-t-il comme avant
Et n'aurons-nous, alors, tiré aucune leçon de cette embellie au goût amer ?
Ou bien emprunterons-nous désormais des sentiers neufs,
Des chemins inédits,
Abandonnant l'inutile,
Ayant, une fois pour toutes, goûté à l'essentiel,
Entrevoyant même une issue à cette apocalypse que nos insomnies préparaient à bas bruit ?

Nous en tenir à l'indispensable,
Prendre soin de ceux qui nous sont proches,
Adopter la sobriété de l'herbe qui pousse,
Imiter son courage,
Regarder la nature enfin comme notre bien le plus précieux,
Ce trésor qui appartient à tous, 
Si désirable depuis que nous nous sommes remis à cultiver nos jardins,
A soigner les fleurs sur nos balcons, à y semer des graines d'espérance,
A donner de la nourriture aux oiseaux,
A nous saluer les uns les autres avec gratitude...

Quand reprendra le flux de nos activités incessantes, 
Saurons-nous oublier la démesure qui auparavant nous tenait ?
Nous souviendrons-nous qu'être vivant ne nous donne pas plus de droits qu'au moindre passereau,
Mais seulement celui de remercier et de rendre grâce pour le simple fait d'être là,
Ouverts à la profusion du monde ?

Aucun de nous n'a plus de mérite que le plus humble paysan d'Afrique, des Andes ou d'Asie
Dont la joie de vivre n'a jamais eu besoin 
De tous ces dominos de possessions que nous n'avons cessé d'accumuler
Et qui s'écroulent tout à coup :
Nos futiles jouets d'enfants qu'enfin, pour donner sa chance à la vie,
Nous serons peut-être prêts à remiser au grenier de nos passions tristes,
De nos allégresses oubliées...

Jean Lavoué, 21 mars 2020

















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