.
« La « brûlure du Poème »
Est en moi comme un vide incendiaire
Que je n’ai pas voulu remplir. A jamais neuf.
Et qui s'invente de neuf chaque jour. »
Cette parole de Christiane Singer,
Quelques jours avant de refermer son cahier
De célébration et de douleur,
Derniers fragments d’un long voyage,
Reste en moi l’empreinte absolue du Mystère en sa vie,
Le secret de sa brûlante présence au monde
Le "Poème" qu'elle nomme encore dans son écrit, faute d’autre vocable,
De ce mot religieux de « christianisme »,
Avec ce "isme" accolé à toutes les idéologies triomphantes et défaites de la modernité,
C'est aussitôt pour l'effacer
Sous le souffle d'un vent qui parcourt toutes les terres de l'humanité,
En chaque être relié à tous en son indivisible unité.
Christiane habite un jardin
Où le tombeau de toutes les religions reste vide à jamais.
Elle a traversé la terre des concepts
Qui croient se faire de la vérité
Une proie saisissable,
Une Source à notre portée,
Du croyable à notre mesure.
Ce n'est pas du vraisemblable qu'elle nous monnaye
À longueur de pages, de romans, de récits
Mais de l'invraisemblable,
À jamais neuf chaque jour.
Ce n'est pas du croyable qu'elle nous distille,
Mais du feu,
Du soleil,
De la pourpre incendiaire !
Elle invite chacun à retrouver en soi
Le fil de la merveille,
Et ce n'est pas là légende pour crédules affamés de signes,
Mais nudité pour la raison,
Folie pour les sages,
Scandale pour les croyants.
Car nul vêtement ne peut plus recouvrir
Ce jaillissement de vie ardente
Dont elle a apprivoisé la Source,
Nulle explication,
Nulle compréhension…
Seulement le geste pur de se tenir
Au lieu de la plus dure traversée,
Et de ne pas récuser la Parole qui en jaillit :
En ce lieu de désolation et d'allégresse,
De vulnérabilité et de force,
De mort et de vie.
Au cours des derniers mois de son existence,
Elle y a basculé toute entière.
Elle n'a rien gardé par devers elle ;
Et c'est pourquoi elle se tient au lieu de toutes nos déroutes
Comme une porte grande ouverte,
Une allée de traverse,
Un rayon de soleil perçant le rideau opaque de la pluie.
Chacun de ses mots, relus intensément,
Nous confie à l’instant même le sésame,
Ce souffle de fin silence
Que nous gardons en nous
Comme l'étincelle de la Vie la plus sacrée.
Là où nous sommes le plus singulier
Croît le germe qui nous relie à l'universel,
Là où nous nous sentons le plus perdu,
Le plus abandonné,
S'offre le lieu Unique et tendre de la Rencontre Fraternelle.
Jean Lavoué, 4 mai 2017
.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire