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mercredi 8 février 2017





Petits propos poétiques de campagne à l'usage des utopistes

N'avez-vous pas remarqué combien le roi est nu ?
La formule, certes, n'est pas nouvelle,
Mais jamais réalité ne fut plus évidente :
Je ne parle pas ici d'un roi en particulier,
Mais aussi bien de tous les rois réunis,
Candidats de tout poil, de France et d’ailleurs.
Car pas un seul n'échappe au massacre du temps :
Qu'il soit doux ou cruel, rêveur ou malfaiteur,
Ne change rien à l'affaire.

Nul ne se sent plus tenu d'en haut,
Aucun n'est soutenu d'en bas.
Même la force brutale se retourne un jour contre eux.
Ils peinent à unir ceux-là sur qui ils croient régner.
Et aucun d'eux pourtant n'est dupe :
Survivre est devenu un passe-temps,
Tenir le sceptre que tous envient une malédiction.

Et si les règles qui ont fait les rois étaient tout simplement à oublier :
Plus de destin providentiel !
Plus de magistrature suprême !
Plus de palais, ni de dorures, ni de crêtes de droit divin !
Mais cette lente assemblée des sources,
Cette mutation des énergies montant du sol,
Ce rappel tenace de la terre et du bien commun,
Cette profonde convergence du fleuve dont nul ne peut plus se dire capitaine ! 
Plus de place d'exception qui ne soit le fruit d'un accord intime et durable,
Entre les femmes et les hommes, la nature et l’humain,
À rebours de la glorieuse histoire et de ses mythes défunts.

L'arbre qui a fait son temps c’est par la cime qu'il meurt,
Celui qui, sûr de lui, défie l’ouragan sera balayé !
Mais celui qui entend la rumeur du vent,
Celui qui voit par delà l'horizon,
Celui qui ne fait pas taire en lui l’enfant déboussolé,
Celui qui donne la parole aux passants, aux inconnus, aux étrangers aussi bien qu’à ses proches,
Celui-là sera peut-être écouté.
Seules sont fécondes les racines quand survient la tempête !


S’il se croit, celui-ci ou celle-là, aussi démuni que tous
Mais cependant confiant dans la vigueur commune,
Et aussi dans ce feu qui parfois nous réchauffe,
S’il ne veut porter, coûte que coûte, les signes du vainqueur,
Mais redonne à chacun, à force de patience,
Le souverain éclat de son royaume et de sa joie,
Alors il ne se tiendra plus dans les hauteurs,
Il ne gouvernera plus en marchand d’illusion,
Mais il aura trouvé dans le cœur de tous
Le germe de lumière qui fait de chacun une reine ou un roi.

Jean Lavoué

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