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mardi 23 mai 2017

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C'est par l'immense fleuve des racines,
Cette nappe souterraine où s’abreuvent nos sources,
Par cette grande communion invisible
Qui parfois nous fait signe,   
Que nous sommes reliés les uns aux autres…
Ou plutôt, comme le disait l'amie Christiane Singer,
Qui le vit encore avec nous, 
Que nous sommes "à l’intérieur les uns des autres"...


Jean Lavoué


































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dimanche 21 mai 2017

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Le ciel s'engouffre par la fenêtre :
Tu vas jusqu'à toucher les nuages.

Te tenir debout dans cette chambre d'hôpital,
Et marcher,
Te redonne le souffle et la vision du large.

Tu dialogues avec les oiseaux de ta race
Et tu n'as pas peur de l'espace qui vient.

Tu es dans la compagnie des passants qui te précèdent.
Tu ne fais aucune différence entre absence et présence.

Tu reconnais simplement qu'écrire invite à se lever,
Et tu t'en tiens à ce constat de l'abandon et de l'Ouvert.

Tant de vies consumées qui n'ont pas reconnu leur lieu
Tandis que, vulnérable avec tous,
D’invisibles fils de partout te relient
À l'inconnu qui t'embrasse et t'élargit.  


Jean Lavoué, Le 20 mai 2017, hôpital du Scorff à Lorient
Photos JL, nuages à ma fenêtre hier matin, rives du Scorff hier après-midi





















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vendredi 19 mai 2017

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La clairière,
Elle s'ouvre à chaque pas
Même si tu ne la vois pas.
Elle appartient au chant du fleuve.
Elle niche avec ses oiseaux.
Elle se tient ouverte et clairvoyante
Dans le feu des journées.
Elle n'a pas d'autres rides
Que celles du vent remontant vers la Source.

Elle pactise avec le silence,
Avec le souffle,
Avec le rien.

Elle n'attend ni ne guette aucune proie.
Elle laisse aller l'ici 
Dans le chant de sa présence.
Elle n'est sûre que de la joie verticale
Et du secret qui la concerne.
Elle est partout décentrée d'elle-même 
Et du désir d'en dire trop.

Elle n'a pas son pareil
Pour susciter les morts.


Jean Lavoué
Photo JL, Le Blavet près de l'écluse de Polvern


















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mardi 16 mai 2017

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Ce que certains nomment « néant absolu »,
D’autres « l’instant l’éternité »
Et d’autres encore « la Grande Vie »,
Toi tu le nommes
Élancement des ailes,
Vallée miraculeuse,
Rives non séparées, 
Soleil dérivant au gré des eaux du large,
Avenance de nuages et liberté de feuilles,
Murmure sans fin des sources, 
Vases aux nids d'oiseaux,
Polyphonie du vent, 
Mains qui se conjuguent
Différences accordées, 
Incandescence de l’Ouvert,
Chemin sans chemin,
Lieu sans lieu,
Chant vertical.

Éveil sans auteur ni sujet,
Sans mémoire ni oubli,
Sans espoir ni demain,
Tu n'y mesures ni le temps ni l'espace,
Tu n'es plus celui qui pense
Ni l'être satisfait qui sait,
Tu te tiens là sans y être,
Infiniment présent,
Sans futur ni passé.

De ce néant tu serais plutôt
L'inconnaissable et le connu,
Le souffle qui te traverse,
L'énergie invisible,
Les racines et l'envol,
Le manque offert à tout
L’espace qui te relie.

Tu te laisses éveiller
Par la musique du jour
Et par les cris d’oiseaux
Jusqu'aux racines
Jusqu’au silence
Jusqu’au point d'orgue.


Jean Lavoué
Photo JL Le Blavet, Hennebont.

samedi 13 mai 2017

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Si d’aventure le souffle
Un jour vient à manquer
Choisis-toi un cours d'eau,
Un fleuve, une rivière.
Peuple-la de grands arbres
Épris de vent et de lumière.

Arpente ses sentiers,
Ses sous-bois, ses halages !
Compose avec ses infinis,
Ses méandres, ses silences.
Déchiffre ses inconnus,
Cherche son nom secret,
Ne te retiens pas d’avancer.

Trouve-toi des compagnons de route,
Des passants du soleil
Qui savent s'arrêter,
Prendre leur temps,
Puis te laisser aller. 

Ne compte pas tes pas,
N'arrête pas les heures,
Fais confiance aux courants,
Laisse-toi respirer.


Jean Lavoué
Photo JL, Le Blavet, Hennebont


















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mardi 9 mai 2017

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À l'impossible
Nous opposerons les ferments
De tous les possibles.
Nous renouerons avec l'invraisemblable,
Avec l'audace.
Nous ne laisserons pas tranquilles
Les chiens féroces qui se disputent la misère des pauvres.

Nous serons de toutes graines levées
L'élan, la tige et la couronne.
Nous ne mépriserons pas les ronces de la peur,
Mais nous ferons des terres dévastées où elles croissent
Des jardins partagés, 
Des cultures protégées,
Des espaces gagnées sur l'inhumain 
Et sur les murs qui les tenaillent. 



Jean Lavoué

































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dimanche 7 mai 2017

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Au bout de nos doigts
Sortir du marais des ombres
Elargir l’issue


Jean Lavoué



























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jeudi 4 mai 2017




« La « brûlure du Poème »
Est en moi comme un vide incendiaire
Que je n’ai pas voulu remplir. A jamais neuf.
Et qui s'invente de neuf chaque jour. »

Cette parole de Christiane Singer,
Quelques jours avant de refermer son cahier 
De célébration et de douleur,
Derniers fragments d’un long voyage,
Reste en moi l’empreinte absolue du Mystère en sa vie,
Le secret de sa brûlante présence au monde

Le « Poème » qu'elle nomme encore dans son écrit, faute d’autre vocable,
De ce mot religieux de « christianisme »,
Avec ce "isme" accolé à toutes les idéologies triomphantes et défaites de la modernité,
C'est aussitôt pour l'effacer
Sous le souffle d'un vent qui parcourt toutes les terres de l'humanité,
En chaque être relié à tous en son indivisible unité.

Christiane habite un jardin
Où le tombeau de toutes les religions reste vide à jamais.

Elle a traversé la terre des concepts
Qui croient se faire de la vérité 
Une proie saisissable,
Une Source à notre portée,
Du croyable à notre mesure. 

Ce n'est pas du vraisemblable qu'elle nous monnaye
À longueur de pages, de romans, de récits 
Mais de l'invraisemblable,
À jamais neuf chaque jour.

Ce n'est pas du croyable qu'elle nous distille,
Mais du feu,
Du soleil,
De la pourpre incendiaire !

Elle invite chacun à retrouver en soi
Le fil de la merveille,
Et ce n'est pas là légende pour crédules affamés de signes,
Mais nudité pour la raison,
Folie pour les sages,
Scandale pour les croyants.

Car nul vêtement ne peut plus recouvrir
Ce jaillissement de vie ardente
Dont elle a apprivoisé la Source,
Nulle explication,
Nulle compréhension…

Seulement le geste pur de se tenir
Au lieu de la plus dure traversée,
Et de ne pas récuser la Parole qui en jaillit :
En ce lieu de désolation et d'allégresse,
De vulnérabilité et de force,
De mort et de vie.

Au cours des derniers mois de son existence,
Elle y a basculé toute entière.
Elle n'a rien gardé par devers elle ;
Et c'est pourquoi elle se tient au lieu de toutes nos déroutes
Comme une porte grande ouverte,
Une allée de traverse,
Un rayon de soleil perçant le rideau opaque de la pluie.

Chacun de ses mots, relus intensément,
Nous confie à l’instant même le sésame,
Ce souffle de fin silence 
Que nous gardons en nous
Comme l'étincelle de la Vie la plus sacrée.

Là où nous sommes le plus singulier
Croît le germe qui nous relie à l'universel,
Là où nous nous sentons le plus perdu,
Le plus abandonné,
S'offre le lieu Unique et tendre de la Rencontre Fraternelle.  

Jean Lavoué
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