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dimanche 14 octobre 2018










Ô petite vie empêchée
Par tant de douleurs et de drames,
Je m’agenouille devant toi
Comme on laisse venir en soi
L’humble bourgeon de la vie.

Tu ne connaîtras pas
La splendeur des étés
Ni les brasiers d’automne,
Mais seule cette lumière nue,
Emmaillotée de gel.

Tu ne sauras rien de ce monde
Où ton père et ta mère
N’ont pas su te dire oui ;
Tu ne sauras rien de leur détresse
Ni de leur amour prisonnier
De cet enfer quotidien
Où il leur fallut bien vivre.

Tu ne sauras rien des inquiétudes
Qui partout montent à l’horizon,
Ni des injustices croissantes
Brisant les meilleures intentions.

Tu ne sauras rien de la violence,
Ni des jugements fanatiques,
Ni des meurtres d’âmes
Quand le désir s’évanouit.

Tu ne sauras rien non plus de la tendresse
Dont l’enfant est notre seul refuge
Tandis que de partout la terre saigne,
Que s’emballe un tourbillon de folie.

C’est à genoux que j’implore ton pardon
Face à la détresse d’hommes et de femmes
Qui est aussi la mienne ;
Ce que nous n’avons pas pu faire pour toi,
Avec chacun je m’en sens responsable :
Ne sommes nous pas tous autant de pauvres êtres
Éprouvant à chaque souffle nos limites ?

Qui suis-je pour juger,
Quand toi c’est d’une vie promise
Dont tu étais le cœur battant
Qu'ensemble nous n’avons pas su porter ?

C’est vers toi que ma prière se tourne
En gestes d’infinie compassion,
Conscient qu’avec nous le monde se tient
Juste au bord de l’abîme.

Qu’aurions-nous pu faire que nous n’avons pas fait
Pour que la vie de chacun,
La tienne la première,
Peu à peu ne s’asphyxie ?
La tienne beaucoup plus tôt que d’autres,
Mais dans le même tourment
Que toutes celles qui ne voient plus d’issue
Aux encoignures de chaque pas.

S’il est un être qui puisse,
Sans nous juger,
Nous aimer quand même un peu,
Nous comprendre,
C’est toi et toi seul
Dans le secret de l’homme,
Le cœur immense de Dieu.

Tu es du très-bas
Le visage et l’enfance,
La douleur transfigurée
Qui se tait et rayonne.

Ô printemps d’innocence,
C’est toi qui donnes prix
À chacune de nos vies,
Toi devant qui nous restons
Silencieux, désarmés.

Pas de cris de colères,
Pas d’injures ni d’anathèmes,
Mais seule l’imploration
À l’ardente miséricorde
Pour n’être, pleins de rêves brisés,
Pétris de trous et d’impossibles,
Que de simples humains,
Mortels, mais désirant la Vie.


Jean Lavoué, 13 octobre 2018
Photo : asiabasia Pixabay

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